Les oiseaux sont des animaux fascinants, une particularité qui les distingue des autres espèces du reigne animal est le port de plumes, ce qui leur permet de voler. Ce plumage est un élément essentiel pour l’identification des espèces, les combinaisons de formes et de couleurs représentent l’identité d’un oiseau, quelque fois sobre et discret, mais souvent éclatant et somptueux.
Par contre, comme nous allons le voir, le plumage d’une espèce d’oiseau peut comporter des secrets qui peuvent dérouter les observateurs débutants, et même les ornithologues amateurs. Pour commencer, pouvez-vous identifier ces deux oiseaux communs?
Si vous avez répondu Mésange à tête noire et Geai bleu, félicitations vous avez la bonne réponse. Par contre c’était un peu facile, ce sont deux oiseaux au plumage distinct et immuable qui sont en ambondance dans nos forêts. Maintenant pouvez-vous identifier ces deux espèces au plumage différent?
Pour le premier, vous avez probablement reconnu le Carouge à épaulettes, un oiseau fréquent dans les milieux humides à partir du printemps. Pour la deuxième photo, la bonne réponse est… Carouge à épaulettes. Si vous n’aviez pas la bonne réponse, et vous vous demandez où sont les épaulettes sur cet oiseau, bienvenue dans le monde complexe de l’identification des oiseaux. Ce qu’on a ici c’est un mâle sur la première photo et une femelle sur la deuxième, un des cas les plus flagrants de ce qu’on appelle le dimorphisme sexuel, lorsqu’il y a une différence marquée entre les deux sexes d’une même espèce.
Dimorphisme sexuel
Le dimorphisme sexuel, n’est pas exceptionnel dans le monde des oiseaux, en fait il est moins fréquent de retrouver des espèces dont le mâle et la femelle sont pratiquement identiques, comme les Corvidés (corneille, geai bleu) et les Paridés (mésange). Chez certaines familles d’oiseaux, comme les canards et les parulines, les différences entre le mâle et la femelle sont très marquantes, il faut retenir deux plumages différents pour chaque espèce.
Canards Colverts femelle et mâle
Dans les cas de dimorphisme sexuel, le mâle est plus coloré que la femelle, ceci est un élément essentiel de la période de reproduction. D’ailleurs certaines espèces mâles ont un plumage spécifique pour cette période, on en reparle plus loin. Fait intéressant, mais quelque fois déroutant, certaines espèces femelles ne possèdent pas la caractéristique de leur nom, comme les épaulettes du Carouge mentionnées plus tôt. Cela est fréquent chez les parulines, la Paruline masquée femelle sans masque, la Paruline bleue femelle sans bleu, la Paruline à calotte noire femelle sans calotte. Il va sans dire que cela rend l’identification de ces espèces plus difficile, mais ce n’est pas tout.
Plumage nuptial
Voici un joli oiseau assez fréquent au Québec, le Chardonneret jaune.
Comme vous pouvez le constater, l’oiseau de la première photo est beaucoup plus coloré que celui sur la deuxième. Le mâle sur la première photo est en plumage nuptial, c’est à dire pendant la période de reproduction, donc habituellement au printemps et parfois se continuant en été, chaque espèce qui mue a son cycle particulier.
Le terme correct pour désigner le plumage que porte le mâle en dehors de la période de reproduction, et qui est différent, plus près de celui de la femelle, est le plumage éclipse. Les canards barboteurs sont particuliers, les mâles vont muer totalement après l’accouplement. Pendant une période de trois semaines à un mois ils vont être incapables de voler, ils sont très difficiles à voir à ce moment là afin de se protéger des prédateurs. Une fois que le plumage éclipse est complet, ils vont ressembler beaucoup à la femelle, lors des observations on a l’impression que les mâles ont disparu. Une fois que les plumes alaires sont repoussées, il y a une autre mue et, vers le mois d’octobre, les couleurs sont de retour.
Il y a certaines espèces dont le plumage nuptial est si différent du plumage d’éclipse qu’il est difficile de croire que c’est la même espèce. Par contre pour ici au Québec, on observe habituellement ces espèces durant la période de nidification, donc on voit le plumage plus coloré du mâle. Le Piranga écarlate est un bon exemple de cette différence, on le voit ici avec le plumage nuptial et le plumage «d’hiver».
Plumage juvénile/immature
Pour cette catégorie, observons deux photos d’un des plus beaux oiseaux qu’on peut observer au Québec, le Pygargue à tête blanche.
Comme on peut le constater, le pygargue de la deuxième photo n’a pas la tête blanche caractéristique de l’espèce, c’est un immature.
On définit un juvénile par la période entre l’arrivée du premier plumage jusqu’à la première mue.
Un immature est un oiseau qui ne peut pas encore se reproduire.
Habituellement ce plumage ne dure qu’une saison. Chez les oiseaux communs, plusieurs espèces de bruants ont des plumages de juvéniles, ils sont généralement assez près du plumage adulte, mais peuvent quand même causer certaines difficultés d’identification (surtout quand certains traits qui servent à différencier les différentes espèces de bruants sont absents chez les juvéniles). Le Merle d’Amérique est probablement le cas le plus facile à observer étant donné son abondance, au fil de l’été on voit apparaître les juvéniles qui ont des taches noires sur la poitrine.
Si on revient au cas du Pygargue à tête blanche, il faut noter que plusieurs rapaces diurnes ont des plumages d’immatures. Le Pygargue n’atteint sont plumage d’adulte seulement après 4 ou 5 ans, un cas assez exceptionnel, il peut d’ailleurs être difficile à différencier d’un Aigle royal tant qu’il n’a pas sa tête blanche caractéristique.
Aussi, certaines espèces de la famille des laridés ont des plumages pré-adultes plus complexes. Par exemple, certains goélands n’atteignent leur plumage d’adulte qu’au troisième ou quatrième hiver, en portant un plumage d’immature légèrement différent à chaque année. Les prochaines photos nous montrent un Goéland à bec cerclé juvénile, immature premier hiver, et adulte.
Différentes formes
Un dernier type de plumage, certaines espèces ont différentes formes, quelquefois subtiles, mais aussi certaines assez évidentes. L’Oie des neiges est un des cas les plus connus, avec une forme blanche classique, et une forme sombre ou bleue, qui est une forme foncée de l’espèce au corps noirâtre et à la face blanche. Un autre cas commun au Québec est le Bruant à gorge blanche, avec une forme à sourcil blanc et une forme à sourcil chamois, on peut voir la différence sur les deux photos suivantes.
Conclusion
Comme vous pouvez le constater, l’identification des oiseaux peut être complexe. Contrairement aux deux espèces que vous avez identifiées au début de cet article, dont le plumage est toujours identique et les sexes sont impossibles à différencier, la plupart des oiseaux ont plus d’un plumage. L’âge et le sexe de l’oiseau, de même que le moment de l’année, peuvent tous influencer l’identification. Certaines femelles d’espèces proches, comme les parulines ou les canards, sont pratiquement impossible à différencier d’un coup d’oeil rapide, à moins d’être un expert aguerri, ou de pouvoir observer longuement les caractéristiques sur une photo.
Mais n’est-ce pas cette variété et cette abondance de choses à apprendre qui fait de l’observation d’oiseaux et de l’ornithologie amateure une activité si passionnante?
Photo de couverture: Linda Hartong / CC BYUn guide parfait pour identifier les différents plumages sur le terrain, le Guide des oiseaux du Québec et des Maritimes.